JOURNEE DE LA COMMUNE 15EME EDITION: POUR UNE GESTION FONCIERE DECENTRALISEE DURABLE : QUELS ENJEUX

La question de la gestion décentralisée des terres au Burundi a été menée à l’occasion de la Journée de la Commune  organisée par l’Association des Communes du Burundi (ACO-BURUNDI) du 20 au 21 mars 2024 au Chef-lieu de la Province de Gitega.

Lors de ces assises, 4 thématiques complémentaires ont été abordées sous à savoir :

  • La réforme foncière au Burundi
  • Evolutions récentes en matière de gouvernance foncière au Burundi
  • Gestion foncière décentralisée : les services fonciers communaux
  • Cadre légal et institutionnel des services fonciers communaux

L’objectif de telles réflexions était de relever les enjeux qui entourent la question de la gestion décentralisée des terres pour évoluer vers un modèle permettant un fonctionnement aisé et durable des services fonciers communaux. A cet effet, quatre experts se sont succédés pour donner des communications y relatives.

 

Evolutions récentes en matière de gouvernance foncière au Burundi

Dans sa communication, Monsieur René Claude NIYONKURU a démontré que dans la réalité, le secteur du foncier, en tant que source principale de revenus des Burundais, est en crise. Et cette crise est une résultante de plusieurs facteurs dont la pression démographique qui s’exerce sur une superficie exiguë, aléas climatiques (le Burundi perd chaque année 4 tonnes de terre par hectare suite aux éboulements de terrain) un nombre important de sans terres, statut confus de certaines catégories de terres (marais par exemple), problématique de réinsertion des réfugiés et de réintégration des déplacés intérieurs et bien d’autres…

Selon le même expert, les solutions jusqu’ici apportées à cette crise foncière étaient plus orientées vers la gestion des conflits fonciers plutôt que de privilégier la gestion du patrimoine foncier pour le long terme.

En guise d’exemple : Les ressources allouées à la gestion du patrimoine foncier domanial ont été évaluées à  85 653 743 BIF  (2017), tandis que pour la même année les ressources allouées à la gestion des conflits fonciers entre rapatriés et résidants ont été estimées 7 Milliards BIF.

                  La réforme foncière au Burundi

De son côté, Monsieur MACUMI Damien, Secrétaire Exécutif de la Commission Foncière Nationale a retracé l’historique de la réforme foncière au Burundi. Il a indiqué à cet effet, que l’idée de réforme foncière remonte au 4 Février 2008: lorsque le Gouvernement du Burundi a sorti  un communiqué indiquant que « les conflits fonciers sont devenus une source importante d’insécurité constatée à travers tout le territoire Nationale ».

Les réflexions qui ont suivi ont abouti à la création d’un Comité technique interministériel ayant conduit le processus d’élaboration d’une lettre de politique nationale foncière et la révision du code foncier.

Ainsi le code foncier révisé a introduit  un certain nombre d’innovations dont les principales se trouvent être :

  • La création d’un service foncier de proximité au niveau de la commune chargé de la délivrance des certificats fonciers définissant les droits sur la terre.
  • La nomination des commissions collinaires, comportant des élus et des notables, pour assurer l’identification locale des droits certifiés par le service Foncier communal.
  • L’inventaire des terres domaniales

Cadre légal de la gestion décentralisée des terres

Concernant le cadre légal de la gestion décentralisée des terres,  Maître Loochi Muzaliwa a partagé son analyse sur l’état de la législation dans ce secteur. Il s’est interrogé sur la fiabilité et la durabilité du service foncier communal dans le contexte légal actuel.

Ainsi, du point de vue fonctionnel, l’expert a fait remarquer que la loi est muette quant au cadre organique du service foncier communal, étant donné que le seul agent mentionné dans la loi communale est le Responsable du Guichet Foncier communal qui travaille sous le contrôle de l’Administrateur communal.

Les échanges ont révélé par ailleurs que le responsable du Guichet Foncier communal  est par ailleurs souvent non qualifié par rapport aux exigences techniques de ce poste.

De  plus, il a été mentionné que la tutelle tant technique qu’hiérarchique n’est pas clairement défini, ce qui pose le problème de contrôle qualité.

En outre, l’expert a fait mention de l’absence d’un plan foncier communal. Celui-ci doit, selon l’article 386, régulièrement être mis à jour et surtout indiquer :

  • les dépendances domaniales;
  • les parcelles titrées ;
  • les parcelles faisant l’objet d’un certificat foncier délivré par le Service foncier communal ;
  • les terrains ayant fait l’objet d’une reconnaissance mais lesquels les limites et les droits restent litigieux;
  • les limites des aires soumises à un régime juridique dérogatoire à la présente loi

Par ailleurs, l’expert a exprimé ses inquiétudes sur les mécanismes qui sécurisent réellement le domaine foncier des communes. Selon lui en effet, le domaine foncier des communes n’étant enregistré nulle part (pas de titre foncier), ces terres peuvent être facilement reprises par l’Etat.

Sur la même ligne d’idées, l’expert a indiqué que les services de l’Etat (Cadastre national, Titre Foncier) ont compétence sur les terres du domaine foncier de l’Etat et sur le domaine foncier des communes, ce qui amène le risque de superposition des compétences sur un même espace.

 

Projet de développement d’un modèle standard (Business Model) de la gestion foncière décentralisée

 

Cette thématique a été développée par Monsieur Rémy NDAYIRAGIJE, Représentant Légal de VNG International au Burundi.

Sa communication avait pour objectif de proposer un modèle de gestion foncière décentralisée durable et financièrement viable.

 

  • Développement d’un modèle standard pour l’amélioration de la durabilité et de la viabilité financière et technique pour les services fonciers communaux.
  • Développement d’une feuille de route pour la mise à l’échelle nationale du modèle pour les SFC

Au niveau de la fiabilité technique, le modèle propose un staff technique à profils variés selon la nature des tâches que le service foncier communal est appelé à exécuter.

Ainsi, le profil proposé est le suivant

 

  • Un informaticien pour jouer le rôle de conservation et de sécurisation qui suppose la constitution d’une banque de données informatisées de façon à les retrouver par téléchargement même en cas d’incendie de l’immeuble qui les abrite.

 

  • Un Juriste pour jouer le rôle Notarial en assurant la sécurité juridique des actes posés par le service foncier communal et/ou la commune (Assurer qu’on évite des erreurs de droits qui peuvent exister y compris la superposition des actes comme le Certificat foncier et le Titre de propriété)

 

  • Géomètre pour jouer le rôle cadastral avec les activités qui s’y rapportent comme la délimitation, le mesurage, le bornage, assurance de la qualité des PV de reconnaissance, etc.

 

Du point de vue de la viabilité financière, le Service foncier communal devra facturer les différents actes  posés comme la certification, la mutation, l’Inscription et radiation de l’hypothèque, demande de Duplicata (en cas de perte du certificat foncier), Morcellement   (distinguez les raisons Successorales/donation  / ou la vente, amendes et pénalités sur les transactions  irrégulières, dépassement des délais , retard de retrait  de certificat, faux rendez-vous le jour de la reconnaissance, Baux à ferme (terres des particuliers en location – Contrat de location), consultation du registre  pour des fins diverses

Le modèle propose également la signature de l’homme et de la femme sur le certificat foncier pour les couples légalement mariés